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Mr Djibo Nouhou, Président du CGDPC, sur la crise togolaise: « au-delà de la question des réformes politiques, se trouvent d’autres inquiétudes notamment le déficit démocratique et le problème de l’alternance au sommet de l’Etat, doublés de la crise socio-économique latente dont la cause est la mauvaise gouvernance des deniers publics… »

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Le Togo, notre pays est secoué depuis le 19 Août dernier par une crise politique sans précédent marquée par des manifestations  gigantesques organisées par le Parti National Panafricain (PNP).Depuis, une initiative d’un dialogue inter togolais impulsée par le président Ghanéen, le facilitateur Nana Akufo Ado entre les différents protagonistes (la coalition des 14 partis de l’opposition et le pouvoir en place ) de la crise est bloquée sur la question des mécanismes de retour à la constitution originelle de 1992 et ses implications. La société civile togolaise, tout aussi divisée ne veut pas non plus être en marge de cette page de l’hisotire du Togo. Plusieurs organisations de la société civile se sont en effet prononcées pour proposer des pistes de sortie de crise. D’autres ont également organisées des actions d’envergure. Dans ce même sillage, le Président du Centre pour la Gouvernance Démocratique et la Prévention des Crises, Mr Djibo Nouhou livre les points de vue de son organisation par rapport à cette situation qui prévaut. Votre journal vous propose l’intégralité de l’interview.
bonjour monsieur Djibo vous êtes le président du CGDPC. Comment se porte votre organisation ?
Djibo Nouhou: Le CGDPC se porte à merveille. Depuis Février dernier, il y a une nouvelle équipe, que je dirige, et prête à œuvrer pour la réalisation des objectifs du centre.
Bientôt sept (7) mois que le Togo est secoué par une crise sociopolitique, quelle analyse faite vous de la situation ?
Djibo Nouhou: La crise politique togolaise existe depuis 2005, sa réapparition en 2017 était prévisible du simple fait que plusieurs points des  recommandations de l’APG n’ont pas été mises en œuvre, notamment les réformes constitutionnelles et institutionnelles dans un esprit consensuel.
Mais au-delà de la question des réformes politiques, se trouvent d’autres inquiétudes notamment le déficit démocratique et le problème de l’alternance au sommet de l’Etat, doublés de la crise socio-économique latente dont la cause est la mauvaise gouvernance des deniers publics. C’est ce qui fait qu’on entend des slogans du genre « 50 ans ça suffit » pour ne pas dire « 50 ans de mauvaise gouvernance ».
Pour trouver une solution à la crise, les différents acteurs de la crise ont entamé des discussions sous l’égide du président Ghanéen. Selon vous qu’est-ce on peut espérer de ce dialogue ? 
Djibo Nouhou: Le vœu de tous les Togolais c’est que ce dialogue soit celui qui mettra le Togo sur les rails de la démocratie véritable. Beaucoup d’acteurs reste pessimiste et parle même déjà de blocage
car la radicalisation des positions des protagonistes donne matière à réfléchir. Déjà au cours de la semaine écoulée, la coalition des 14 partis politiques de l’opposition avaient annoncé des manifestations de rue en réponse aux représailles dont  aurait été victime la population de  Kparatao de la part des militaires. Il faut dire que ces agissements des parties n’augurent rien de bon pour le peuple togolais qui a beaucoup fait les frais de la crise politique.
Toutefois, nous pensons que le facilitateur est assez confiant et nous espérons qu’il saura faire entendre raison aux protagonistes pour que ce dialogue enclenché puisse apporter des solutions idoines aux différents points inscrits à l’ordre du jour afin qu’on enterre cette crise qui n’a fait que trop durer. Quelle que soit les solutions à apporter il faut que le Togo tout entier en sorte gagnant.
La principale revendication de l’opposition consiste à un retour intégrale de la constitution de 1992.comment trouvez-vous cette revendication ? Ce retour est possible ? 
Djibo Nouhou: Quand on parle du retour à la Constitution de 1992, on se demande si les leaders de l’opposition le veulent vraiment ou s’ils veulent simplement s’en servir pour faire partir Faure Gnassingbé du pouvoir en voulant lui appliquer le fameux alinéa … « en aucun cas nul ne peut faire plus de deux mandats ». Rappelons que, à  l’atelier du HCRRUN en juin 2016 personne n’en a parlé et même  jusqu’à avant août 2017 ce n’était pas le cas non plus.
On peut revenir à la Constitution de  92 mais soyons-en sûrs,  elle ne réglera pas tous les problèmes. La dynamique d’une nouvelle constitution reste la  meilleure solution pour l’avenir du pays puisqu’ elle permettra de régler beaucoup de choses.
En tant qu’acteur de la société civile, quel regard portez-vous sur l’attitude des acteurs de la société civile dans cette crise togolaise ? 
Djibo Nouhou: On peut faire deux constats à ce sujet: D’une part, au Togo une partie de la société civile a été pervertie par les politiques. Cela a entrainé une certaine division avec l’apparition de deux camps notamment la société civile proche du pouvoir et celle proche de l’opposition. C’est une incongruité qui ne permettra pas à ces organisations de jouer pleinement leurs rôles d’autant plus qu’elles doivent rester apolitiques
D’autre part, les organisations qui ne sont pas rentrés dans ce jeu politique, au fil des années, gagne en expérience et donc en maturité. Il faut retenir que le rôle de la société civile dans un Etat, c’est non seulement d’œuvrer pour le bien-être des populations, mais aussi de servir de contre pour, de moralisateur du jeu politique  et par conséquent, de rappeler les différents acteurs à l’ordre dès lors qu’elle constate que les intérêts du peuple sont en jeu dans une parfaite neutralité.
Sur ce l’on pourra dire que la société civile joue sa partition malgré les difficultés qu’elle ne cesse de rencontrer. C’est d’ailleurs le lieu d’inviter les uns et les autres à les soutenir et les encourager d’une manière ou d’une autre dans leur noble tâche d’éveil des consciences.
Quelle piste de sortie vous vous préconisez  aux protagonistes de la crise ?
Djibo Nouhou: La crise que traverse le Togo est une crise politique. Par conséquent il faut au-delà de tout, une solution politique. Je l’avais dit un peu plus haut, il s’agit outre le malaise social, d’un problème d’alternance au sommet de l’Etat et de la nécessite d’une bonne gouvernance des affaires publiques. D’abord Le compte cumulé du règne de Faure Gnassingbé et de son père est illogique et semble un affront au peuple. Voilà entre autre, des raisons qui militent en faveur du départ de Faure en 2020. Cette question doit faire l’objet d’une négociation entre les parties. Et l’idéal serait que le chef de l’Etat accepte déposer le tablier. Une fois la solution politique trouvée, on pourra, en ce moment, la transposer en règle juridique et prévoir ses effets.
Ensuite en ce qui concerne les réformes constitutionnelles, au risque de me répéter, la dynamique d’une nouvelle constitution reste la meilleure option pour le Togo mais là également les solutions doivent être proposées de façon consensuelle.
À part cette conjecture sur le plan politique, le front social est aussi en ébullition via des grèves répétées dans le secteur de l’éducation, de la santé etc… à qui incombe la responsabilité de ces différents mouvements d’humeurs qu’on observe dans ces secteurs?
Djibo Nouhou: Au gouvernement bien évidemment!  Je pense que ça fait plusieurs années que dans le secteur de l’éducation, nous assistons à une crise qui tarde à trouver une solution idoine. C’est aussi le cas dans les autres secteurs comme la santé.  L’année passée pour le secteur de l’éducation,  le gouvernement dans un souci de limiter les dégâts et afin de mettre fin à la crise, avait mis en place un groupe de travail composés des fédérations de l’éducation,’ des partenaires et du gouvernement.
Mais malgré cela la solution tarde à venir et on a l’impression que le gouvernement joue une fois encore avec les enseignants alors qu’il lui suffisait de les rassurer et trouver un terrain d’entente avec eux pour trouver de façon graduelles les bonnes solutions à leurs revendication.
Et l’entrée en grève des agents de la santé  ne présage rien de bon car les hôpitaux au Togo sont devenus des mouroirs avec peu de personnel soignant et une quasi absence de matériels de soins.
Le gouvernement togolais a une obligation de résultat dans ces deux secteurs afin de soulager les populations qui n’en peuvent plus de souffrir.
Au plan international, nous assistons depuis quelques temps à des  tensions et  à la démission de  plusieurs chefs d’État suite à des contestations sociales ou politiques dont ils font l’objet. Est-ce la preuve d’un enracinement de la démocratie sur le continent?
Djibo Nouhou: C’est déjà un bon début, même si cela ne suffit pas à déterminer le degré de l’enracinement de la démocratie. La démocratie est une quête quotidienne mais il est intéressant d’assister a des changements démocratiques positifs sur le continent.
Par ailleurs ce qui est important à relever dans ces événements, c’est que l’on a l’impression que le peuple retrouve effectivement sa souveraineté et sa place dans la gestion des affaires publiques tel que le recommandent les principes de la démocratie. Mais cela ne doit pas nous faire perdre de vue les autres fondamentaux de la démocratie tournant essentiellement autour des droits de l’homme.
Mr Djibo nous sommes à la fin de notre entretien. Votre mot de fin?
Djibo Nouhou: Tout comme tout vrai patriote, une fois encore je voudrais faire appel aux protagonistes de la crise togolaise, à jeter un regard compatissant envers le peuple pour qui eux tous prétendent lutter et au nom de qui tous prétendent parler. Le peuple togolais n’a qu’une aspiration: avoir le minimum vital et vivre dans la paix et la cohésion sociale. Les problèmes politiques ont trop fait du tort à ce petit pays qui a pourtant tout pour que ses fils et filles connaissent le bonheur sur tous les plans Alors vivement que ce dialogue porte de bons fruits. Merci et que Dieu bénisse le Togo.
Réalisée par Elom ADABE
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